Parijs - 19e eeuw Samuel Henry Berthoud

CuBra

HOME

 

1870

L'Esprit des oiseaux

De uit het nest gevallen huismus

En 1845, la petite fille d'un fermier du département du Nord ramassa au pied d'un mur un moineau encore sans plume, et qu'un accident avait, comme il arrive que trop souvent, jeté à bas de son nid. La pauvre bestiole se mourait de froid et de faim. L'entant la plaça dans son sein, la réchauffa, l'apporta chez elle et la nourrit de pain détrempé dans du lait, qu'elle lui présentait au bout d'une menue baguette. Le moineau, d'abord, resta languissant ; mais à force de soins sa bienfaitrice parvint à l'élever, et à lui donner de la force et de la vigueur. Il finit même par devenir un beau mâle, à la tête cendrée et aux joues bleuâtres ; un bandeau rouge brun s'étendait de l'un de ses yeux à l'autre, en passant par l'occiput; un cercle noir entourait ses yeux, et depuis son cou jusque sur ses ailes et sur sa queue, miroitaient de charmantes nuances brunes et grises d'un pourpre sombre ; enfin une plaque noire recouvrait sa large poitrine, et faisait valoir la finesse et l'élégance de sa taille.

L'oiseau ne quittait point un instant sa maîtresse ; au logis, il se tenait perché sur son épaule, ou bien il se réfugiait dans le giron de la jeune fille, pour s'y endormir ; à table, il grimpait sur le dossier de sa chaise, à l'affût des bribes de pain ou de légumes, dont il se montrait fort friand ; la nuit, il se blottissait sous le traversin du lit, et y dormait jusqu'à l'aube. Dès que la jeune fermière s'éveillait, il sortait de sa retraite, caressait de son gros bec noir et jaune les lèvres de l'enfant, se baignait dans la cuvette où elle avait fait sa toilette, lissait ses plumes, et venait ensuite prendre gaiement sa part du déjeuner. Sortait-elle, il l'accompagnait, tantôt perché sur sa tète, tantôt volant capricieusement de çà et de là, d'arbre en arbre, de buisson en buisson, toujours en mouvement, toujours pétulant, toujours gai.

 

De huismus verdwijnt, de papegaai verschijnt

Un beau jour, il disparut, et je vous laisse à penser du chagrin qu'en éprouva celle à qui il devait la vie, et pour laquelle il professait tant d'affection. On donna une perruche verte à la petite désolée, et celle-ci, qui, de même que tous les autres enfants, se consolait aussi vite qu'elle s'affligeait vivement, commençait à aimer l'oiseau émeraude presque autant que le moineau, qu'elle accusait de l'avoir délaissée en prenant la fuite, quand un matin elle entendit de petits coups secs résonner vivement à ses vitres; elle se hâta d'ouvrir, car c'était le moineau perdu qui l'appelait ainsi.

 

De huismus vermoordt de papegaai

Dépouillé d'une partie de, et dont il ne voulait point s'éloigner, eut beau l'appeler; il fit la sourde oreille, et ne répondit qu'en battant les ailes avec colère et en ouvrant un bec menaçant.

Le lendemain, la perruche succomba à une blessure grave qu'elle avait reçue au crâne dans son combat avec son rival ; et un domestique l'emporta à la ville voisine pour la faire empailler.

Quand il vit passer le cadavre de celle qu'il haïssait tant, le moineau revint à tire-d'aile chez sa maîtresse. Confus, repentant, il implora son pardon par les caresses les plus tendres et les plus soumises, et il fit tant et si bien, que, malgré le meurtre qu'il avait commis, il finit par rentrer en grâce.

 

 

 

De papegaai wordt opgezet, en hoe de huismus daarop reageert

A quelque temps de là, le naturaliste chargé de préparer la perruche la renvoya à la ferme. On voulut voir comment le moineau se comporterait en présence de la dépouille de sa rivale défunte, et on la mit brusquement vis-à-vis de lui. D'abord il recula , se gonfla et se rua sur elle ; mais presque aussitôt il recula brusquement. Il avait reconnu qu'il n'avait point affaire à un être vivant, mais à une peau bourrée, et il se retira honteux et mécontent dans un coin de la ferme, où il bouda le reste de la journée.

In de Jardin des Plantes

En ce moment le cri d'un perroquet, et une main qui se posait sur mon épaule, me tirèrent de ma rêverie : c'était un de mes vieux amis, attaché aujourd'hui au Muséum et qui a parcouru tous les pays du monde.

« Je vous y prends, me dit-il, vous êtes là en extase devant un de mes perroquets ; cet oiseau, peut-être ne le savez-vous pas, est un des oiseaux exotiques les plus anciennement connus en Europe.

 

De papegaai in de Middeleeuwen

« En effet, au moyen âge, on voyait fréquemment dans les châteaux et les manoirs des barons, deux oiseaux particulièrement recherchés. Le premier était le perroquet.

« D'après les tableaux et les gravures parvenus jusqu'à nous, le perroquet semble avoir été connu des Anglo-Saxons sous le nom de ragofine, mot dont la dernière syllabe signifiait tout simplement un pinson ; les deux premières syllabes, dont l'etymologie n'est pas bien certaine, se retrouveraient peut-être dans le mot hrage (chèvre). On ne voit pas d'abord bien clairement pourquoi le perroquet aurait reçu le nom de chèvre-pinson; mais Turner Smith, savant peu connu du xvme siècle, l'explique par les sauts et les bonds auxquels se livre le pauvre oiseau captif ou attaché par la patte sur un perchoir. En France on leur donnait le nom de papegaut.

« Alexandre Denis, l'un de nos anciens trouvères, appelle le perroquet « jongleur et ménestrel des oiseaux, » non à cause de la beauté de son chant, mais de son talent mimique et de ses tours joyeux. Il parle aussi de sa malice et de sa facilité à copier la voix de l'homme, en ajoutant qu'il est plus intelligent et plus amusant que les jongleurs eux-mêmes.

 

Een papegaai op kruistocht

« De si brillantes qualités attirèrent naturellement sur ces oiseaux une certaine auréole de superstition ; on croyait qu'en outre de l'idiome par lequel les oiseaux s'entendent entre eux, et qui a donné lieu à une foule de fables et de légendes, les perroquets comprenaient aussi le langage de l'homme.

« Un chevalier normand, dit Denis, possédait un perroquet qu'il aimait passionnément, et qu'il lui fallut quitter pour prendre la croix et aller guerroyer en terre sainte contre les infidèles. Pendant qu'il parcourait la Syrie, et qu'il se trouvait dans le voisinage du mont Gelhoë, en Samarie, qu'on croyait être la patrie primitive des papegauts, ce chevalier en rencontra un parfaitement semblable au sien, et lui dit en badinant : « Mon perroquet, qui est enfermé dans une cage et qui vous ressemble, vous salue. »

« A peine eut-il prononcé ces mots, qu'à sa grande stupéfaction l'oiseau tomba comme mort sur la terre.

« De retour en Normandie, le chevalier raconta cette aventure à ses amis, près du perroquet enfermé dans la cage, et l'oiseau tomba aussitôt privé de sentiment du haut de son bâton. Le chevalier, effrayé, le sortit de sa cage pour essayer de le ranimer; mais l'oiseau n'eut pas été plutôt posé sur le sol, qu'il se releva, s'envola et ne revint plus.

Jardin des Plantes