Parijs - 19e eeuw Paul Lacroix (1806- 1884) & Le Gastronome

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1806, 27 februari

Paul Lacroix geboren in Parijs

Datering

 

Vous auriez cru que le colon français, émîgrant en Guyanne, allait, les bras tendus vers la patrie, mourir d'inanition sur la grève américaine, nourrissant son souvenir, son seul souvenir, hélas ! des tourtes, des biseaux dorés de là métropole? Pas du tout: dans son exil, la cuisine vient lui offrir des consolations ; cet art secourante laissa-t-il jamais ses enfans au besoin ! Non , non : si le colon n'a plus ces truffes du Périgord, ces faisans de la mère-patrie, et qu’on ne saurait dépayser sans leur faire perdre leur fumet, il est là-bas de ces hommes précieux dont nous avons parlé, de ces êtres secourables consacrés à la science gastronomique , qui lui préparent des voluptés insolites , des jouissances inattendues : cet expatrié, qui, triste, taciturne, croyait n'avoir plus qu'à mourir, se met machinalement à table. Des pâtés de langues de perroquet ! des tortues en daube! c'est tout au plus s'il ose y porter la main... O miracle-! ses traits s'épanouissent, son visage reprend un air radieux dont il avait perdu l'habitude. Qui y ramène tant de sérénité? en doutez-vous? les raffinemens de la bonne chère du pays. Des sensations dont il ne soupçonnait pas la magie ont chatouillé son palais. Non, la vie ne lui est plus à charge ; il vivra heureux, content. Qui lui fait ainsi un Èden de ce lieu d'exil ? son cuisinier.

(…)

Tandis que le maître-d'hôtel du ministère se surpasse, se rengorge aux éloges de tout le centre en masse, qui lui vote des félicitations, notre Cayennais se reporte en imagination dans ses plantations chéries ; il s'y voit mollement balancé dans un hamac par une jeune et jolie négresse, en attendant l’heure du dîner; une autre négrillonne agite mollement sur lui un éventail de plumes d'aras pour lui rafraîchir l'air. L'heure du dîner arrive : il se voit servir un excellent potage de chair de carette ou grande tortue ; vient le bouilli; il voit, à sa grande satisfaction, cet étalage de viandes surmonté de la tête de singe, pièce de rigueur sans laquelle un Cayennais croirait sa soupe manquée. À cela succèdent des perroquets : les jeunes sont rôtis , et présentent leur dos appétissant d'embon point ; les vieux sont mis en daube et saupoudrés d'épiceries dont les cuisiniers du lieu ont seul le secret. Mais ce que les sybarites américains préfèrent à toute chose, ce sont les pâtés de ces langues de perroquets rondes, charnues, manger divin dont l'Européenne saurait se faire une idée.

(…)

Je pousserais plus loin l'examen de la cuisine cayennaise, si l'autorité, sans perroquets, sans groëgroë, sans carette, s'entretenait du fol espoir de conquérir des votes transatlantiques avec la bonne chère de la métropole.

Perroquet â la carte

1884, 16 oktober Paul Lacroix overlijdt in Parijs