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Paul
Alexandre Martin Duval, dit Jean Lorrain - écrivain
français à très forte tendance parnassienne, né à Fécamp le 9
août 1855 et mort à Paris le 30 juin 1906.
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Bron |
In 1897 Lorrain engaged in a duel with
Marcel Proust (Lorrain had called Proust "one of those
pretty little society boys who've managed to get themselves pregnant
with literature" in a review of Pleasures and Days, and managed
to suggest that Proust was gay in a newspaper article), and it wasn't
his first duel. In 1886 he refused to engage in a duel with Guy de Maupassant,
who thought he recognised himself in Lorrain's novel Très russe, and
in 1887 he came face to face with journalist René Maizeroy. In 1888
he managed to escape from a duel with Paul Verlaine.
The duel with Proust appears to have been stylized: both fired a
bullet, but nobody was hurt, and their enmity evaporated instantly.
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1885
Modernités
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Een
dierlijke flux de bouche
Darling
La
moustache soyeuse et rousse, bien en chair;
Une
chair de beau blond à l'œil appétissante,
Carrant
les reins nerveux et l'épaule puissante
Dans
le tricot foncé sur le pantalon clair.
Le
darling se promène en face de la mer,
Indolent...
Et
la troupe affreuse et médisante
Des
dames en chapeaux rubis, effervescente,
Détaille
son costume et sa marche et son air.
«
C'est un grec
—
Un escroc!
—
« Pis, la vieille duchesse
«
D'Athys l'entrenait —
«
Il est du cercle exclus. »
—
« La juive madame Irb est, dit-on, sa maîtresse.
«
Voyez, c'est indécent... la petite comtesse
«
D'Orseuil, elle s'arrête et lui rend son salut? »
—
« La comtesse, sa mère, était une drôlesse...
«
Après tout, et la fille aura de qui tenir... »
Et
c'est un flux montant de cris, d'aigres paroles,
Une
rumeur d'oisons et de perruches folles.
En
délire, écorchant l'homme à n'en plus finir.
«
Je l'ai connu jadis, j'en ai bon souvenir,
«
Il était gondolier, à Venise, en gondole,
«
Oui, madame, et chantait le soir la barcaroUe ! »
«
Chanteur!
—
« Un tel passé répond de l'avenir. »
Et
le darling aimé, ravi de tant de haine,
Beau,
sans tempérament, lentement se promène,
Serti
dans son tricot anglais.
Son
seul orgueil
Est
d'avoir mis le clan des laiderons en deuil,
Tandis
que, dédaigneux, en marchant, il égrène
Des
aveux non sentis dans l'oreille mondaine
De
quelque madame Irb ou comtesse d'Orseuil.
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1888
Dans
l'oratoire |
Papegaaienmeisjes uit Zuid-Amerika
Combien d'élues sur tant d'appelées?
Une justice doit être pourtant rendue; c'est dans le clan des
étrangères, des jolies Brésiliennes,
Chiliennes et autres petites perruches des Antilles que le sort des
belles mesdames X... est surtout envié, discuté, commenté;
c'est dans le monde des rastaquouères — eh bien oui! rastaquouères!
écrivons le mot, il ne déshonore personne — que nous retrouvons
les plus splendides contrefaçons de la belle madame Gauthereau.
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1897
Monsieur
de Bougrelon |
De
papegaai met de vergulde snavel
-
Mais pourquoi insisterais- je davantage? vous m'avez compris,
Messieurs. Pourquoi le nègre étrangla cette guenon, la calomnie
n'osa pas même prononcer le mot que nous avons tous chuchoté. Le
perroquet, un ara blanc aux ailes tachées de rose, au bec
doré à l'or moulu
(cette Barbara avait des raffinements de luxe inconcevables), avait
l'équivoque manie de becqueter les lèvres de sa dame et ne voulait
manger que dans sa bouche, on l'avait dressé à cela...
Paquita, elle, coiffait et décoiffait, soir et matin, la Hollandaise...
La jalousie arma la main du nègre, je n'en dirai pas plus: nous
devons le respect aux morts et j'ai, durant cinq ans, aimé d’amour
cette folle Barbara.
Denkbeeldige
genietingen
Vertaling
Jeanne Holierhoek, 1978
Maar
waarom zou ik langer uitweiden? U heeft mij begrepen, heren. Waarom
die neger die apin had gewurgd, de achterklap durfde zelfs het woord
niet uit te spreken dat wij allen hadden gefluisterd. De papegaai,
een witte ara met roze gevlekte vleugels en een bek verguld met
goudpoeder (die Barbara had onvoorstelbaar geraffineerde staaltjes
van luxe) had de dubbelzinnige hebbelijkheid om in de lippen van
zijn bazin te pikken en hij wilde slechts eten uit haar mond, dat
had men hem zo geleerd... en Paquita verzorgde, ochtend en avond,
het kapsel van de Hollandse... Jaloezie dreef de hand van de neger,
meer zal ik er niet over zeggen: wij zijn de doden eerbied
verschuldigd en ik heb die dwaze Barbara vijf jaar lang liefgehad.
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bec doré -
Lorrain gebruikt een zeer zeldzaam beeld: een vergulde bek; In HPM
bevindt zich slechts deze verwijzing / illustratie:
Goya,
Que pico de oro! (uit de serie: Caprichos) 1799
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1897
Monsieur
de Bougrelon |
Borden
als papegaaien in Haarlem
(...)
seule la confiture de gingembre nous remonta, mais nous eûmes pour
nous essuyer les doigts un luxe étonnant de serviettes en papier et
les plats étaient de vieux Deltt
imprimés de devises avec des mots français à même la faïence: Bonjour,
monsieur, bonjour.
Etrange
pays, où les assiettes parlent comme des perroquets! La halle aux
poissons avec des harengères coiffées de chapeaux haute-forme sur
des bonnets de dentelle, nous requit un moment: les poissonneries sont
merveilleuses en ces Pays-Bas, chaque état avec les nacres et les
argents vifs de sa marchandise y forme tableau et ce fut là notre
journée à Harlem, où nous ne vimes pas de tulipes.
(...)
alleen de gemberconfituur monterde ons op, maar om onze vingers af
te vegen kregen we de beschikking over een verbijsterende weelde
aan papieren servetten, en de schotels waren van oud-Delfts
aardewerk bedrukt met spreuken, Franse woorden zo maar op het
plateel: Bonjour, monsieur, bonjour.
Vreemd
land waarin de borden spreken als papegaaien! De vishal met zijn
verkoopsters, die op mutsen van kant hoge hoeden droegen, nam ons
even in beslag: de vismarkten in die Nederlanden zijn schitterend;
elke tafel met de heldere parelmoer- en zilverkleuren van haar
koopwaar vormt er een schilderij, en dat was onze dag in Haarlem,
waar wij geen tulpen zagen.
Vertaling
Jeanne Holierhoek, 1978
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1900
Histoire
de masques: l’homme au bracelet
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Een
enorme papegaai in Barcelona
Barcelone,
Bilbao, Anvers, Saigon ou Marseille, un voyageur au cours d'une
promenade flâneuse à travers les bas quartiers de la ville, s'est
laissé tenter par une jolie tête enfantine penchée à la lucarne
d'une maison sordide. Le voyageur est à peine entré, que le conte
gouaché de tons violents met en scène des
personnages
romantiques c'est une négresse coiffée d'un madras jaune d'or, qui
accueille le galant et le guide l'escalier
gluant tourne en vis au premier palier un perroquet blanc, un ara
monstrueux à huppe rose veille, juché sur un perchoir, mais
au cinquième, les marches de l'escalier flamboient sous un
revêtement de tapis splendides, et la soupente, où il est introduit,
est un retrait de princesse orientale, tout de soie, de laque et de
fourrures argentées et soyeuses; et là une Grecque de Sicile, proiil
de médaille et nudité bronzée de statuette, une femme- enfant de
quatorze ans à peine lui fait, frissonnante et pâmée, l'offrande
d'un corps souple et vierge.
(...)
La
négresse au madras est debout dans l'allée, le
perroquet géant jabote sur son perchoir, l'escalier est
toujours aussi glissant dans son boyau de murailles humides, les tapis
d'Asie flamboient toujours sur les dernières marches, et
l'entremetteuse à la face d'ébène ouvre la porte du réduit... mais,
hélas!
(...)
Le
perroquet géant connaît le cœur des hommes depuis bientôt cent ans
qu'il les voit défler dans l'escalier du bouge; et c'est l'oracle
même de leurs destinées qu'il crie aux libertins, au seuil du
lupanar: tu reviendras, et en effet ils y reviennent tous car
on revient toujours à son vice, comme le chien des écritures à son
vomissement. Pour une fois qu'on y a rencontré la Grecque de
quatorze ans, aux chairs froides et souples, on revient toujours à la
maison infâme, tout convaincu qu'on soit de n'y rencontrer que la
fillasse vieillie aux seins mûrs; mais l'illusion, l'espérance
menteuse d'y entrevoir peut-être, une autre fois, la Grecque de la
première rencontre, nous y ramené inexorablement, toujours leurrés
et toujours prêts à l'être, car c'est la luxure qui nous conduit.
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1901
Le
vice errant
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Sterven
als een schuimbekkende papegaai
La
chambre de la générale V...! Je n'oublierai jamais ce spectacle.
Toutes les bougies des candélabres, toutes celles des lustres
allumées en plein feu, toute l'électricité donnée dans la terreur
qu'avait la misérable femme de ce téte-a-téte avec ce mort. Sur le
lit saccagé comme un champ de bataille, dans le désordre des draps, bouffl,
ventru et obscène, le corps sexagénaire de M. B. sur le tapis, un
tas de serviettes moullées. On avait dû tenter toutes réactifs
possibles, fouetter cette chair apopiectique avec des serviettes
humides, tacher par tous les moyens de rétablir une circulation
arrêtée. La tête chauve était risible et effrayante; les prunelles
chavirées sous les paupières ne laissaient voir que le blanc de l’oeil
dans la face hoursouflée et violette la bouche battait, tumeflée; dans
un filet d'écume une grosse langue, noire comme celle d'un perroquet,
pendait.
(...)
De
papegaai ontsnapt / hoe lok ik een papegaai
Un
soir, par exemple, j'étais appelé en tout hâte: le prince venait
d'être pris d'une crise. Je trouvai la maison bouleversée, le jardin
plein de lanternes et de falots errants; toute la domesticité sur
pied, armée de perches, d'échelles et de cordes.
Un des aras familiers du prince s'était échappé, il avait rompu la
chamette d'argent de son perchoir et avait gagné les cimes des arbres;
c'était justement le perroquet affectioné de Wiadimir, un ara gris
et rose au ventre semé comme degouttes de sang. L'oiseau s'était
enfui vers une heure et depuis on lui faisait la chasse; il s'était
réfugié dans un groupe de palmiers et, caché sous la retombée des
palmes, il demeurait invisible, sourd aux menaces comme aux
supplications. Où était-il?
Le
prince qui, de fureur, s'était mis au lit d'abord dirigeait
maintenant les recherches. A peine vêtu, les pieds nus dans des
babouches, sans souci de la fraîcheur du soir, il courait de-ci
de-là, dans le jardin, maigre à faire peur dans l'envolement d'une
gandoura de soie blanche, et, les mains tantôt jointes, tantôt
tendues en signe de détresse, il s'époumonnait à appeler l'ingrat.
Les noms tes plus tendres se pressaient sur ses lèvres « Mon chéri,
mon amour, âme de ma vie, mon bijou rose! » Toute une litanie
adorante que remplaçaient soudain injures et jurons. Il sacrait
après l'oiseau perfide, le menaçait des pires supplices et, sans
vouloir rien entendre, pas plus le Gourkau que sa mère accourue, la
pauvre femme, et le priant de rentrer, le prince, un véritable
énergumène, envoyait chercher un revolver et faisait feu tout à
trac à travers les arbres du jardin.
Le
perroquet effrayé quittait sa cachette et s'envolait plus loin, dans
le parc d'une villa voisine que le prince voulait faire envahir. Le
concierge s'y opposait, et, de mâle rage, le Noronsoff donnait
l'ordre qu'on tordit le cou à tous ses perroquets.
Ordre
qu'on ne suivait pas, naturellement, en prévision des caprices du
lendemain. Le prince était remonté, exténué, dans sa chambre. Je
dus veiller une partie de cette nuit-là.
(...)
Papegaaientulpenbomen
Tout
a une fin. Un jour, après la représentation, une énorme gerbe de
tulipes était remise à i'acteur en scène: des tulipes géantes,
déchiquetées, jaspes des couleurs les plus vives, jaunes et rouges,
les jaunes éclaboussées de sang, les rouges tigrées d'or, des
fleurs éclatantes et violentes, des tulipes dites perroquet.
Le cabotin se pliait en deux, reconnaissant, et enfouissait son visage
dans les fleurs. Il se redressait en poussant un cri. Du sang lui
giclait près de l’oeil, tachant le velours blanc de son pourpoint;
un effroi d'ailes saccageait les tulipes. Le jeune premier avait
taché la gerbe. Par ordre de Sacha un perroquet avait été caché au
milieu des fleurs, solidement ligoté entre les tiges furieux,
l'oiseau avait cruellement mordu l'Italien à la joue.
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1905
L’ecole
de vieilles femmes
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Struisvogels
met papegaaienkoppen
Ferme
d’autruches!
Et avec sa verve coutumière, silhouettant d’un mot, d’une
épithète la tête chauve, les plumes extravagantes et la demarche
balacée et grotesque, en avant et croupe en l’air, des coûteux
volatiles, de Bergues évoquait le troupeau des vieilles folles
irréductibles dont l’abracadabrante et volontaire jeunesse prolonge
ici, de février à la fin mai, un lamentable carnaval: celles qui
ne peuvent plus vieillir, et, citant des noms à l’appui, de
Bergues, avec l’étonnant vocabulaire dont il est familier, campait
dans un extraordinaire tohubuhu d’assonances des dames en baudruche
à têtes de perruches, dans des irruptions de ruches, de peluches et
de fanfreluches empanachées d’aigrettes d’austruches.
Nous
nous étions tordus de la boutade.
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1906
Crime
des riches
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Applaus
voor vals papegaaiengekwetter
Une salve d'applaudissements couvrait cette inoubliable diction. Voix
d'automate et de ventriloque, c'était aussi un hiement de poulie,
tant ce soprano aigu s'enrouait par moments et d'aigreurs et de trous.
Une
naine à face de petite vieille, un affreux avorton aux grêles bras
trop courts, aux petites mains recroquevillées comme des serres
d'oiseau: quelque chose de malingre, de flétri et d'innomable
évoluait sur la petite scène en somptueuse robe de bal. Plastronné
de strass et plâtré de céruse, le pitoyable petit être faisait des
mines, jouait de l'éventail et, le cou tendu hors des épaules
pointues, faisait songer à quelque marionnette macabre, poupée à
tête de tortue ou momie d'enfant affublée d'une défroque de
carnaval, et l’étrange gazouillis de perruche
aphone continuait: Qu'elle est belle et qu'elle a de grâce!
La naine s'efforçait à la grivoiserie. Et rien n'était plus
effarant dans cette face souffreteuse et friponne, que la lenteur
torpide du regard terne et mort. Et matelots et alpins acclamaient cet
être de cauchemar. Quelle horreur ! qu'est-ce que c'est que çà?
Zénobie:
Flirten met een favoriete ara
Et la représentation commença: ce furent les ellipses de boules d'or
et des poignards du jongleur, les contorsions brillantées de l'homme-
serpent et le cake-walk des danseurs nègres; les négresses avaient
quitté la place.
Debout
sur les genoux du Palermitain, tel un grand
perroquet familier, la princesse Zénobie, virait, voletait, ne
tenait pas en place, attardant ses petites mains dans la barbe de son
maître, lui chatouillant la nuque avec des rires aigus de petite
fille hystérique, tandis que lui, les yeux lubrifiés de désirs,
promenait lentement sa main des cheveux aux talons de la minuscule
Altesse, en insistant à la taille et aux reins, comme sur
le dos d'un ara préféré. O le flirt de clins d'yeux et de
menus attouchements de ce vieux forban de la banque cosmopolite et de
ce phénomène- réclame de cirque forain !
Zénobie:
Gejaagd als een papegaai
Les huit soirées du chanteur Marcus à la villa des Palombes. Leur
atmosphère spéciale en avait tellement impressionné le pauvre
garçon qu'en en parlant il en devenait littéraire, lui Marcus. Dans
l'isolement et le dépaysement de cette petite ville italienne, dont
il ne parlait pas la langue, ces soirées présidées par ces deux
fantoches, dans le luxe écrasant de cette villa qu'on eut dit
déserte, hallucinaient Marcus comme un cauchemar. Tous les soirs, à
neuf heures, il se rendait aux Palombes et retrouvait dans le grand
salon incendié de lumière ses compagnons de captivité. Le grand
rideau de satin cramoisi s'ouvrait comme un voile de sanctuaire et
c'était, dans son immobilité d'idole, la masse effondrée du
banquier de Palerme, le vieil homme aux yeux morts, adipeuxet ventru
sous ses fourrures amoncelées
avec, sur ses genoux, redressée et cambrée sous la caresse de sa
main lente, la naine diamantée, jacassante et trépidante, la
princesse Zénobie à la voix de crécelle , à la fébrile agitation
de perruche. C'est son fausset rouillé qui décidait des audilions.
D'un geste bref elle éliminait tel et lel artiste: les femmes
étaient congédiées. Marcus avait riieur de plaire au monstrillon,
il fut maintenu pendant toute sa semaine au programme. Le quatrième
jour cependant il y eut conflit.
Zénobie:
Een geniepige papegaai
Suffoquée, la princesse Zénobie avait prestement glissé le long des
jambes de son flirt et, comme un gros perroquet sournois qui boude son
maître, elle avait précipitamment, boitillante et courroucée,
gagné la porte. Le battant en claquait violemment.
Zénobie:
Papegaai met een boa
Empanachée d'aigrettes, écrasée sous le poids dun collier
d'émeraudes, elle se cambrait dans rébouriflement d'un boa de plumes
blanches et s'érupait comme une perruche, tout à l'orgueil de sa
nouvelle parure. La naine était rentrée en grâce.
La Mortola et la fontaine de la Sirène, la Mortola et sa clairière
hantée d'agaves monstrueux, énormes, hérissés et coupants, de
toutes les nuances et de toutes les formes, pareils à un cénacle de
gigantesques pieuvres végétales; la Mortola et ses bois de palmiers,
ses champs d'iris et d'anémones où la vision s'impose d'une ronde
de nymphes de Botticelli; la Mortola et sa treille en terrasse
au-dessus de la mer; sa treille enguirlandée de roses et de
clématites, escortée de touffes de primevères, d'héliotropes en
arbres et de chimériques orchidées, jaillis comme des étoiles entre
les retombées de mouvants chèvrefeuilles; la Pergola et le malaise
enivrant, délicieux de son trop de calices et de son trop de
parfums... Et entre toutes ces corolles, toutes ces feuilles, toutes
ces branches, au tournant de tant d'escaliers et le long de tant de
terrasses, le nostalgique horizon de la Méditerranée, la soie
moirée de sa nappe immobile avec, au bord de la mer, les quenouilles
de bronze de son interminable allée de cyprès... Cimetière d'Orient
ou jardin de Gabriele d'Annunzio dans le Triomphe de la Mort.
Nous
étions arrêtés auprès d'une volière et tout en suivant les
mouvements d'automate d'un étrange perroquet, on eût dit, d'émail
vert...
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1906
Le
tréteau
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Een
geslaagde karikatuur
Et elle passait le feuillet au poète. C'était une planche en
couleurs où la tragédienne, déformée dans l'exagération même de
sa silhouette, était représentée tirebouchonnante dans une ligne
zigzaguée à la Boldini. Le nez en bec d'oiseau, la bouche rentrée
et les yeux pochés de bleu sous une tignasse de chanvre en faisaient
une espèce de stryge famélique, une goule trépidante, échappée
d'un sabbat de chienlit.
—
C'est une indignité, c'est ignoble, balbutiait Howey, la face
nerveuse et les mains, agitées.
—
Mais non, c'est très drôle, et voyez l'idée spirituelle: Morfels en
singe et Azuado en perroquet. En effet,
la stryge de la caricature présentait l'un à l'autre,
tenus très haut du bout des doigts, l'oiseau par les ailes et
l'animal par la peau du cou: un ara flamboyant et
un aflreux ouistiti. Elle les maintenait face à face,
surexcités, mais hors d'atteinte, le perroquet
des griffes du singe, le singe du bec du perroquet. Erupées et
furieuses, les deux bestioles se menaçaient, cherchaient à se mordre,
à s'étreindre. Dans la grimace du singe, Mario reconnaissait la face
chafouine de Morfels; il ignorait l’homme dont
le profil sémite surmontait le corps du perroquet.
—
Mes auteurs, pouffait la tragédienne, Jeanne de Naples et Penthésilée,
Et
elle se renversait en pouffant sur le divan.
—
Je ne comprends pas votre joie, insistait le docteur, les mains
toujours secouées par son tremblement nerveux.
—
Que voulez-vous, si mes amis me voient ainsi !
—
Vous n'allez plus recevoir ce Jacob après cela, je suppose.
—
Que voulez-vous, c'est son droit de me dessiner telle je lui apparais.
Il faut croire qu'il voit juste et que c'est nous qui avons tort, mon
cher, puisque son album s'enlève. C'est le quatrantième mille en
huit jours.
—
Une honte! Linda haussait les épaules.
—
Il faut vivre. C'est tout de même dur d'être reconnue dans ça par
ses amis. Ah, notre prestige, il est frais devant les foules après
une exécution pareille! Me voyez-vous avec ces yeux-là, vous,
monsieur Nérac?
—
Oh! Madame.
Apen
contra papegaaien
Et
l’Avignonnais se précipitait sur les mains de Linda. Elle ne lui
laissait pas le temps de se pencher, elle avait elle-même élevé le
poignet et, d'un joli geste, prévenu son désir, Howey revenait à la
charge.
—
Le singe et le perroquet, vous trouvez cela d'un ami.
—
Cette sotte histoire, Jacob en a tiré un bon parti.
Et
se tournant du côté de Mario:
—
C'est vrai, vous ignorez, vous, vous n'êtes pas de Paris. Ah! on a
colporté quelques idioties sur votre amie. Ce
perroquet et ce singe, c'est toute une légende. J'ai eu, en effet, un
singe et j'ai encore chez moi une volière; ne m'a-t-on pas accusée
d'enfermer mon singe avec mes perroquets pour les faire se battre et
se déchirer entre eux. Le singe plumait vives mes perruches et mes
aras mordaient mon ouistiti. C'était un massacre. Et cela a
été imprimé, il y a eu des journaux... On a écrit encore pis:
j'asseyais mes singes sur la tôle rouge d'un poêle et les faisais
brûler vifs. L'âme de Torquemada et la moralité de Messaline!
—
Ah, Linda! faisait l'ami de la maison en essayant de fermer la
bouche à la tragédienne. Mais cela, c'est la gloire, n'en parlons
plus. Allons à table!
Koosnaampjes
Quand elles étaient là, le jeune homme, mal à
l'aise, ne
reconnaissait plus Linda; la physionomie si touchante de l’actrice
prenait, elle aussi, quelque chose de cruel. Ces femmes ressemblaient
bien plus à Myrhine que Myrhine ne ressemblait à sa sœur et, caressée,
adulée par elles, la Monti finissait par ressembler à ces femmes.
Elles se donnaient des noms d'oiseaux, ma colombe, ma tourterelle, ma
perruche, etc., dont la familiarité déplaisait à Mario; et
puis elles partaient, comme elles étaient venues, en bourrasque:
elles allaient à une première, à un souper de centième ou à une
répétition générale. C'étaient des amies, des actrices, comme lui
avait dit Linda, mais en ce moment libres d'engagement et qui ne
jouaient dans aucun théâtre. Howey détestait, lui aussi, ces femmes:
Myrhine et son troupeau de damnées, ainsi dit un jour le docteur.
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1906
Madame
Manpalou
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Spaanse
toestanden
—
Des Espagnols! Ceux-là, je vous les accorde, ricanait de Lhomers,
tous princes ou prêts à le devenir, infatués de leurs titres,
gorgés de noblesse, suite et cour indiquées de toutes les altesses
royales plus ou moins proscrites en exil ici... Ah! que de reines
Nathalie! Un milieu gourmé, astiqué, ciré et naïf, où
triomphaient les
grâces de Pierre Loti: perroquets du Brésil, perruches des
Antilles,
jolis, jacassant et insupportables oiseaux des îles dont ils ont les
yeux brillants et vernis. C'est mademoiselle de Montijo qui les a
amenés ici, l'ex-impératrice; ils y sont
demeurés et ont fini par s'y croire chez eux: Biarritz est une plage
espagnole.
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1907
L'aryenne
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De
kakelende jonge nimf
Rébecca
Riesmer, pour impressionner ses visiteurs avait passé à la hâte un
ample et flottant peignoir en tulle de soie argenté, plissé en
accordéon; de larges manches ouvertes accompagnaient ses mouvements
d'un battement d'ailes, et lumineuse et brillante dans toutes ces
transparences nitides, qui la vêtaient comme d'une eau, Mélisande
avait l'air d'un Watts descendu de son cadre; le prince seul souffrait
en lui- même du théâtral et du voulu de ce costume d'apparition.
L'académicien
et la grosse Egérie continuaient de se confondre en éloges. Un flux
d'épithètes inondait la jeune nymphe, un
caquetage exaspéré de perruche garrulait à chacun de ses gestes.
Mélisande ravie buvait, comme un philtre, les métaphores ampoulées
de la grosse Muse et de son Immortel.
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1906,
30 juni |
Jean Lorrain overlijdt
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1907
Normandy,
Georges
Jean
Lorrain (1855-1906) son enfance, sa vie, son oeuvre (nombreux
documents littéraires, graphiques et iconographiques inédits)
|
Jean Lorrain quitta Paris sous la pluie et sous les fleurs pour aller
dormir son dernier sommeil sous le granit de la tombe familiale, dans
le cimetière désert de sa ville natale. Tout le Paris des lettres et
des arts vint le saluer. Ses obsèques à Saint- Ferdinand-des-Ternes,
furent une solennité très parisienne. On n'échappe pas à la
Capitale. Albert Flament (Sparklet) put écrire, malgré son émotion,
ces lignes justes: « ... On songe, malgré soi, à l'article qu'il
aurait écrit, à ce qu'il aurait pu trouver sur les demoiselles ayant,
pour assister à l'office funèbre, des
perroquets verts à leur chapeau, des voiles roses et des
fleurs artificielles, et cela rend
plus triste, infiniment, de voir s'en aller sous les parapluies
ouverts le cortège, le corbillard et toutes ces fleurs, tant de
fleurs qu'il aimait, hortensias, lis, œillets et roses dont l'odeur,
par l'orage, a quelque chose de fade, de tourné, dont il aurait
traduit, mieux que personne, la saveur écœurante. Ce qui manque le
plus, la seule chose même qui manque à son enterrement, c'est qu'il
y soit. »
D'ailleurs
ces parisianismes obligatoires n'ont que l'importance qu'on leur donne.
S'il est consolant de penser qu'un souvenir durable et des regrets
demeurent dans l'àme de quelques-uns de ceux qui furent ses amis, de
ceux qui firent
profession
de l'être et de ceux, — innombrables — qu'il obligea, il demeure
acquis — et cela seulement importe — que l'auteur de Aryenne
a su ennoblir par la couleur et le rythme de ses phrases, les
déchirements de notre chair, les douleurs des cœurs qui souffrent et
les attitudes fugaces des amants, dont les bouches s'épanouissent
pour le baiser où se tordent pour la mort. Voilà pour l'œuvre.
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2010
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